Emmanuel Macron s’est livré à son exercice favori : offrir l’image d’un président à l’écoute, parler des difficultés des Français comme s’il les vivait lui-même, soucieux d’y apporter remède…en poursuivant sa politique, avec ce qu’il faut d’autocritique pour se poser en victime de l’incompréhension générale. Concrètement, des mesurettes dans l’immédiat et des promesses pour le reste.
« Je vous ai entendu »…
Durant une heure le président s’est efforcé de montrer qu’il avait entendu les colères exprimées depuis des mois dans les rues et les ronds-points, donnant en réalité le sentiment qu’il avait découvert les difficultés des Français à l’occasion du « grand débat ». Obligé de concéder qu’il n’avait pas toujours eu une attitude adaptée à la situation, il a rapidement corrigé ce méa culpa en affirmant que l’on ne tarderait pas à voir les effets positifs de sa politique.
D’emblée il était clair qu’il n’était pas question de changer de cap. Changer de méthode oui, dit-il, mais rien de ce qu’il a entrepris ou réalisé ne devait être remis en cause : la hausse de la CSG, la suppression de l’ISF, les privatisations scandaleuses des aéroports de Paris et des barrages hydrauliques…Mais comme ne rien bouger lui était impossible il a confirmé la résindexation des petites pensions sur l’inflation et la promesse de faire dans deux ans le bilan de la suppression de l’ISF et éventuellement d’en revoir les modalités.
Le dégagisme façon Macron
Caractéristique du discours présidentiel, ce souci de mettre les difficultés des salariés et des retraités au compte des politiques de ses prédécesseurs est omniprésent. Dégager sa responsabilité en invoquant les réformes non abouties depuis des décennies et justifier du même coup les siennes et celles à venir pour aller jusqu’au bout de la « modernisation du pays qui doit s’adapter au monde qui change ».
Mais il annonce une autre forme de dégagisme : les difficultés « du quotidien » ne sont pas du ressort président de la République ni de l’Etat mais doivent être assumées par les collectivités dans le cadre d’une nouvelle décentralisation. Quant on connaît les difficultés de financement des collectivités territoriales on peut imaginer que les difficultés du quotidien ne sont pas prêtes de se résorber.
Une nouvelle méthode gouvernement ?
L’incompréhension qui selon lui a accompagné sa politique pourtant si pertinente serait due à une insuffisance de « délibérations démocratiques » à laquelle le « grand débat » a commencé de répondre. Exploitant le reproche qui lui est fait de décider tout seul, il a chargé le gouvernement d’une série de missions censées apporter des réponses aux revendications formulées dans le « grand débat ».
Autre astuce projeter les solutions réclamées par les manifestants salariés et retraités dans les réformes en chantier ou à venir, une façon assez perverse de justifier ce qui a été fait et ce qui est envisagé comme la réforme des retraites. Réforme qui devrait assurer plus de justice et d’égalité en supprimant les régimes spéciaux et en abandonnant, sans le dire, le système de retraite par répartition au profit de la retraite par points. Une promesse de réduction d’impôts en échange d’une réduction des dépenses publiques, traduire par une réduction des services publics.
Des concessions en lien direct avec les mobilisations
Nous reviendrons dans le détail sur les annonces ou les absences d’annonce du président de la République mais d’ores et déjà son discours confirme ce que beaucoup redoutaient : Emmanuel Macron, contraint certes à un peu d’humilité, ne veut rien changer à sa politique malgré l’absence des résultats promis. Les faibles concessions consenties sont le résultat des mobilisations des retraités : réindexation des petites pensions, promesse d’arrêt des fermetures des hôpitaux et des services publics, des personnels de l’éducation : aménagements des conditions de travail des enseignants, de la jeunesse : promesse de lutter contre les dérèglements climatiques, des salariés : promesse d’augmenter leur pouvoir d’achat…
Une constatation s’impose : la mobilisation de toutes les victimes de sa politique peut imposer à ce régime de régression un changement de cap. Les retraités CGT vont s’y employer.
Pascal Santoni