Succession d’un retraité dans les Bouches-du-Rhône : comprendre les droits du conjoint survivant

La place du conjoint survivant dans la succession : les règles de base

Le droit français a prévu une protection particulière pour le conjoint survivant. Les règles varient selon la présence d’enfants, l’existence ou non d’un testament, et le régime matrimonial.

Absence de testament : la dévolution successorale classique

En l’absence de testament, la loi prévoit :

  • Si le défunt avait des enfants (du couple ou non) :
    • Le conjoint survivant peut choisir entre :
      • L’usufruit de la totalité de la succession (il pourra en percevoir les revenus tant qu’il vit, mais pas vendre le bien sans l’accord des nus-propriétaires, c’est-à-dire les enfants),
      • Ou la propriété d’un quart de la succession en pleine propriété.
  • S’il n’y a pas d’enfants, le conjoint survivant hérite de l’intégralité de la succession, sauf s’il y a des parents (père et/ou mère du défunt) encore vivants, auquel cas chacun recevra un quart de la succession et le conjoint survivant en recevra la moitié.

C’est le notaire qui informe le conjoint survivant de ce choix, qui doit être exercé dans un délai de 3 mois après l’ouverture de la succession (service-public.fr).

En présence d’un testament

Le défunt peut organiser sa succession différemment par testament, mais il doit respecter la réserve héréditaire des enfants, qui doivent percevoir une part minimum de la succession. En dehors de cela, il peut avantager son conjoint pour la quotité disponible (partie de la succession dont il dispose librement).

Le rôle du régime matrimonial

Le régime matrimonial (communauté, séparation de biens, participation aux acquêts) influe sur la composition de la succession. À titre d’exemple :

  • Communauté légale (après 1966) : la moitié des biens communs appartient déjà automatiquement au conjoint survivant.
  • Sous la séparation de biens : seuls les biens appartenant vraiment au défunt intègrent la succession.

Les droits spécifiques du conjoint survivant : ce qu’il ne faut pas négliger

Le droit au logement temporaire et viager

  • Le conjoint survivant, s’il vivait effectivement dans la résidence principale avec le défunt, bénéficie du droit au logement :
    • Droit temporaire : il peut continuer d’occuper le logement gratuitement pendant 1 an à compter du décès (même si le bien appartient aux enfants hériters).
    • Droit viager : il peut demander à rester dans le logement toute sa vie, à condition d’en faire la demande dans l’année suivant le décès. S’il s’agit d’un bien en indivision avec d’autres héritiers, il devra leur verser une indemnité d’occupation.

À noter : le droit au logement s’applique que le bien soit acquis ou loué et que le conjoint survivant soit propriétaire ou non du bien (notaires.fr).

Revenus du conjoint survivant : pension de réversion et capital décès

  • Pension de réversion :
    • En moyenne, la réversion représente entre 54 % et 60 % de la pension du retraité décédé, suivant le régime (régime général ou complémentaires).
    • Pour bénéficier de la pension de réversion du régime général, le conjoint doit avoir été marié avec le défunt (le PACS ou le concubinage ne suffisent pas) et respecter des conditions de ressources (en 2024, 24 232 € par an pour une personne seule, source : Assurance Retraite).
    • Le versement n’est pas automatique, il faut en faire la demande. Une seule démarche suffit pour la plupart des principaux régimes coordinés.
  • Capital décès :
    • Sous conditions, un capital décès peut être versé par la Sécurité sociale si le défunt était encore dans l’activité salariée au moment du décès (rare chez les retraités). Pour les fonctionnaires, une prestation similaire existe parfois.

Spécificités et conseils pour les Bouches-du-Rhône

Ce département présente des particularités démographiques et familiales qui peuvent impacter concrètement la succession.

Un département au tissu familial dense et à la forte proportion de familles recomposées

Les Bouches-du-Rhône comptent plus de 500 000 retraités (INSEE, 2023), dont une part significative dans les familles recomposées. Dans ce contexte, le conjoint survivant peut se retrouver en indivision avec des enfants non communs, une source fréquente de litiges. Pensez à :

  • Faire établir un état des lieux précis du patrimoine (immobilier, comptes, assurances vie, livrets, etc.).
  • Dialoguer rapidement avec le notaire pour s’informer sur ses droits et les délais à respecter.
  • Rassembler tout document prouvant sa qualité de conjoint marié (livret de famille, acte de mariage…).

Les donations entre époux dans la région

Selon une étude de la Chambre Interdépartementale des Notaires PACA, à Marseille et dans la région, les donations entre époux (« donation au dernier vivant ») restent sous-utilisées, alors qu’elles permettent d’augmenter la part du conjoint (jusqu’à la quotité disponible). Une démarche simple pour améliorer la protection du conjoint.

Précisions sur la fiscalité successorale dans les Bouches-du-Rhône

Depuis la loi de 2007, les droits de succession entre époux ont été supprimés. Ainsi, le conjoint survivant (non divorcé, non pacsé, non concubin) ne paie aucun droit de succession. En revanche, il peut être redevable de droits lors du partage du patrimoine si des biens sont vendus, ou en cas de versement d’une soulte.

Dans les Bouches-du-Rhône, des situations locales méritent l’attention :

  • La présence fréquente de résidences secondaires (Côte Bleue, Alpilles, etc.). Elles créent souvent l’indivision qui peut devenir conflictuelle. Demandez conseil avant de vendre ou de racheter les parts des cohéritiers.
  • Les droits d’enregistrement pour les actes notariés sont identiques à la moyenne nationale, mais des frais annexes peuvent s’appliquer localement (honoraires supplémentaires, publication foncière).

Les démarches à suivre étape par étape après le décès

  1. Faire constater le décès et obtenir l’acte de décès (en mairie du lieu du décès).
  2. Prévenir le notaire, les banques, les caisses de retraite (très important pour enclencher les démarches de réversion).
  3. Faire le point sur le régime matrimonial ou la présence de donations/précautions prises par le défunt (testament, assurance-vie…) avec le notaire.
  4. Rassembler tous les documents personnels : livret de famille, relevés bancaires, titres de propriété, etc.
  5. Consulter rapidement le notaire pour être accompagné sur :
    • La déclaration de succession
    • Le choix entre usufruit ou pleine propriété le cas échéant
    • L’organisation de l’indivision et du partage avec les autres héritiers
  6. Déposer une demande de pension de réversion auprès de la caisse de retraite principale (L’Assurance Retraite).
  7. Vérifier l’existence éventuelle de contrats d’assurance-vie qui sont hors succession ordinaire (mais les bénéficiaires doivent se manifester).

Foire aux questions pratiques et points d’attention

  • Le conjoint survivant est-il prioritaire sur les enfants ? Non, sauf dispositions particulières (donation au dernier vivant ou testament), les enfants restent héritiers réservataires : le conjoint survivant n’a jamais la totalité de la succession si des enfants sont présents.
  • PACS ou concubinage : mêmes droits ? Non : le PACS et le concubinage n’ouvrent pas les mêmes droits que le mariage pour la succession ni la pension de réversion.
  • Quels délais pour faire valoir ses droits ? Pour la pension de réversion : pas de délai précis mais plus tôt la demande est faite, plus vite elle sera versée (rétroactivité limitée à 12 mois). Pour la succession : 6 mois pour la déclaration fiscale, 3 mois pour le choix de l’usufruit/plaine propriété.

À noter : dans les Bouches-du-Rhône, le coût médian d’une succession simple tourne autour de 2 500 € à 3 500 € en frais notariés, un montant à anticiper (source : Chambre des Notaires 13).

Éviter les pièges et sécuriser les droits du conjoint : recommandations essentielles

  • Anticiper grâce aux donations entre époux ou testamentaires : cela reste la meilleure solution pour élargir la part du conjoint et éviter les litiges avec les enfants d’un premier mariage.
  • Faire une liste à jour des biens du couple, accessible au conjoint survivant, afin de simplifier les démarches.
  • Informer son entourage de ses choix patrimoniaux (établir un dossier ou évoquer le sujet avec ses proches).
  • Consulter un notaire ou un conseiller en retraite, notamment en cas de famille recomposée ou de biens immobiliers multiples, pour une approche personnalisée.
  • Conserver tous les justificatifs de paiement de factures, titres de propriété, courriers importants : ils seront nécessaires pour la succession.

Pour aller plus loin : ressources et accompagnement local

S’informer, anticiper, dialoguer avec ses proches et ses conseillers (notaire, assistant social, association) sont les clefs pour éviter les mauvaises surprises et protéger le conjoint. Même dans les situations complexes ou recomposées, le respect des règles et l’accompagnement personnalisé permettent au conjoint survivant de faire valoir ses droits sans précipitation.

Les successions dans les Bouches-du-Rhône, à la croisée de traditions provençales et de réalités modernes, sont rarement une formalité. En comprenant le détail de la législation et en s’appuyant sur les ressources locales, il est possible pour le conjoint survivant de préserver sa sécurité et de traverser plus sereinement cette étape de la vie.

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